Intermittents - "Vous trouvez que la culture coûte cher, essayez donc l'ignorance!"
Publié le 30 Mars 2016
"Maman, pourquoi je vais chez la nounou demain?".
"Parce que Papa doit encore aller se battre pour garder son métier".
Ça en devient lassant. Tous les deux ans grosso merdo, nos intermittents doivent sortir dans la rue, poings en l'air, pancartes hissées et voix levées. Pour faire entendre qu'ils veulent qu'on arrête de les prendre pour des cons et qu'on cesse de faire croire aux "pas au courant" du régime gé' que les économies doivent forcément être faites dans les poches des pantalons battle des intermittents. Car oui "mesdames, messieurs, ce sont eux qui coûtent cher à notre pays!". (Faut bien changer un peu des migrants...)
Impliquant déjà forcément une vie sous conditions (si si souvenez-vous, le coup des "507-heures-en-10-mois-depuis-la-déclaration-officielle-de-dernier-statut-après-période-obligatoire-de-carence-intermédiaire" pour avoir le droit de donner à manger à ses gamins à la fin du mois) (déjà, si t'es pas sorti de maths sup', accroche-toi pour comprendre les calculs savants qui vont régir ta vie), le statut d'intermittent est lui-même replacé sous conditions tous les deux ans. Ou le systématisme du CDD dans le CDD. Le chat qui se mord la queue. On n'a pas trouvé l'empêcheur de tourner en rond.
Déjà en 2014, c'est de la sacoche des intermittents qu'on avait voulu chiper des deniers pour faire des économies. M. Valls-Grand-Seigneur avait pris en charge la chose (ce n'est pas tant M. Valls qui a de grandes poches que les intermittents qui ont de grosses voix...), mais l'arnaque n'était que repoussée. "Hip hip hip houra", ont dit ceux qui naïvement ont cru que le spectacle était sauvé ; "ouf-pour-un-temps" ont dit les intermittents qui savent bien que chaque petite victoire n'est qu'une bataille remportée jusqu'à la prochaine ruée. "On nous la reclaque en couleurs dans deux ans", a dit mon mari l'intermittent, qui a de plus en plus de mal à aller contre sa nature pessimiste carrière faisant...
"Donc ma chérie, Papa est allé se battre pour garder le droit de vivre de son métier".
Car on veut la garder, la culture française prestigieuse et jolie. Ses théâtres, son cinéma, ses spectacles, les troubadours qui font rire sur scène, et ceux derrière, qui les mettent en lumière. Mais si ils pouvaient travailler pour la gloire et l'amour du métier et pas pour les billets, on aimerait mieux.
"Alors ma chérie, les gens vont te dire que Papa se plaint tout le temps avec ses copains intermittents, mais qu'il va le garder son métier." Mais ils ne verront pas que quatre mois l'année, il ne sera plus payé. Car comme quand on veut donner la fessée, on le fait caché, les grands Monsieurs attendront l'été, pour venir nous piller...